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Le Forum Catholique

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Gabriel Dubois -  2009-01-20 18:19:16

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Monsieur,

C’est à la fois avec un certain plaisir historique et beaucoup d’appréhensions que j’aborde cette question de l’opposition entre orléanistes et légitimistes.

Pour y répondre pleinement, on pourrait remonter jusqu’à Louis XIV, et à la jalousie qui sépara, rapidement, la branche cadette des Orléans et la branche aînée des Bourbons. Cette jalousie, qui tourna parfois à la haine, va trouver une sorte de paroxysme sous le règne de Louis XVI, avec Philippe d’Orléans, dit Philippe Egalité. Le duc de Castries, dans son ouvrage intitulé l’Agonie de la royauté en parle, d’ailleurs, avec beaucoup de talent et un souci de l’anecdote qui permet de mieux saisir le caractère d’abord personnel de ces haines.

Ce n’est pas un hasard si le duc d’Orléans se prononça en faveur de la mort de son frère, si la jalousie et les haines perdureront sous la Restauration, et si Louis-Philippe Ier trahira avec autant de célérité les promesses faites à Charles X, prenant pour lui la couronne qu’il devait conserver pour Henri V, comte de Chambord.

Avec le temps, et surtout avec le pardon du comte de Chambord aux Orléans, les haines entre dynastes vont s’effacer, mais elles demeureront souvent plus vivaces chez leurs partisans.

Au-delà de ces querelles dynastiques, une question d’orientation politique va également se faire jour, qui tiendra tout le XIXe siècle, entre des légitimistes plus intransigeants, certains diront plus réactionnaires, profondément catholiques, parfois théocrates, et des orléanistes plus libérés, adeptes des idéaux de 1789.

Mais cette querelle d’idées, qui sert de grille d’analyse à René Rémond pour son histoire des droites en France, est largement dépassée depuis le début du XXe siècle.

En effet, Charles Maurras, en exerçant un véritable magistère d’un demi siècle sur la pensée royaliste française, a unifié, peu ou prou, les courants, rendant inopérante la distinction entre légitimistes et orléanistes sur le plan des idées. De fait, il y a toujours eu, et il y a encore, des royalistes plus libéraux, d’autres plus contre-révolutionnaires, d’autres plus politiques ou plus religieux, etc. Mais ces distinctions politiques ne sont plus liées à une distinction dynastique, et l’on peut trouver des orléanistes ou des légitimistes dans tout ces courants.

Donc, cette division entre orléanistes et légitimistes, n’est plus dynastiques et idéologique, mais est redevenue essentiellement dynastique.

Quant à la question de savoir, aujourd’hui, quelle est la valeur d’une telle querelle, là encore, l’historien ne peut répondre, à moins de sortir de son domaine pour s’engouffrer dans celui du politique.
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