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Le Forum Catholique

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Anne Coffinier -  2007-12-11 11:47:29

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Le droit romain (catéchisme, code de droit catholique) ne raisonne pas en termes de "sous contrat" ou "hors contrat", puisqu'il s'agit d'une réalité purement française qui ne donne des indications que sur le mode de financement de l'établissement, et ne dit rien sur la catholicité ou la non catholicité dudit établissement.

En d'autres termes, il n'y a aucun lien entre le fait d'être sous contrat et celui d'être catholique. On peut bien évidemment être catholique et dépourvu de liens administratifs et financiers avec l'Education nationale. L'histoire nous montre même qu'il n'est pas aisé pour une école de rester catholique dans le cadre du contrat (lequel est intrusif en matière de contenus des savoirs et philosphie éducative).

Si le droit canon ne s'occupe pas du fait d'être sous ou hors contrat, il pose en revanche des crières de catholicité. A nous de voir lesquelles des écoles indépendantes de l'Etat ou des écoles liées à l'Etat répondent le mieux à cette définition.

En revanche, le droit canon légitime clairement le fait que des laïcs créent aujourd'hui des écoles et demandent à leurs évêques d'en reconnaître officiellement la catholicité. C'est expliqué dans le Canon 803. C'est le pur reflet du principe de subsidiarité. La procédure décrite est des plus simples.

Can. 803 – § 1. On entend par école catholique celle que dirige l’autorité ecclésiastique compétente ou une personne juridique ecclésiastique publique, ou que l’autorité ecclésiastique reconnaît comme telle par un document écrit.

Plus largement, sur la question qui nous préoccupe, voici ce que nous dit le droit canon. J'y ajoute, article par article, quelques commentaires personnels.

Can. 793 – § 1. Les parents, ainsi que ceux qui en tiennent lieu, sont astreints par l’obligation et ont le droit d’éduquer leurs enfants ; les parents catholiques ont aussi le devoir et le droit de choisir les moyens et les institutions par lesquels, selon les conditions locales, ils pourront le mieux pourvoir à l’éducation catholique de leurs enfants.

Commentaire: On retient que les parents ont un devoir d'éducation de leurs enfants dans la catholicité mais que les moyens institutionnels précis sont à définir au regard de la situation concrète.

§ 2. Les pasteurs d’âmes ont le devoir de prendre toutes dispositions pour que tous les fidèles bénéficient d’une éducation catholique.

Commentaire: On retient que les évêques doivent fonder ou aider les laïcs à fonder des écoles catholiques lorsque les fidèles ne bénéficient pas de possibilité effective de scolariser leurs enfants dans une école catholique (soit qu'il n'y ait pas d'école catholique localement, soit qu'elle n'ait pas assez de places pour répondre aux demandes des parents soit qu'elle trahisse en pratique sa catholicité en négligeant son "caractère propre"). C'est à l'évêque, notamment sur information des parents d'élèves, d'apprécier la situation et de prendre des mesures. Il s'agit-là d'une véritable obligation à agir.

Can. 795 – L’éducation véritable doit avoir pour but la formation intégrale de la personne humaine, qui a en vue la fin dernière de celle-ci en même temps que le bien commun de la société. Les enfants et les jeunes seront donc formés de telle façon qu’ils puissent développer harmonieusement leurs dons physiques, moraux et intellectuels, qu’ils acquièrent un sens plus parfait de la responsabilité et un juste usage de la liberté, et qu’ils deviennent capables de participer activement à la vie sociale.

Commentaire: On trouve dans ce canon ce qui définit une école catholique. A nous de voir si l'école où nous scolarisons nos enfants répond à cette définition et si tel n'est pas le cas, s'il ne serait pas possible de mieux y répondre.

Chapitre I
LES ÉCOLES
Can. 797 – Il faut que les parents jouissent d’une véritable liberté dans le choix des écoles ; c’est pourquoi les fidèles doivent veiller à ce que la société civile reconnaisse cette liberté aux parents et, en observant la justice distributive, la garantisse même par des subsides.

commentaire: Le droit canon se prononce clairement en faveur du pluralisme scolaire et de la liberté scolaire. En France, choisir le privé revient à faire des sacrifices financiers par rapport à ceux qui choisissent le public: la liberté d'enseignement est donc bafouée au sens du droit de l'Eglise (canon 797) comme d'ailleurs au sens du droit européen (art 14 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ) ou international (art 18 et 26 de la Déclaration universelle des droits de l'homme ). Les catholiques ne doivent pas s'habituer à l'injustice que représente l'organisation institutionnelle (un monopole public) et financière (les parents d'enfants fréquentant le privé devant payer par leurs impôts la scolarité des enfants du public alors qu'ils doivent déjà payer une large part - voire l'intégralité dans le cas du hors contrat- des frais de scolarité de leurs propres enfants).

Canon 800§ 2. Les fidèles encourageront les écoles catholiques en contribuant selon leurs possibilités à les fonder et à les soutenir.

Commentaire: Soutenir les fondations de nouvelles écoles catholiques (entendez, en droit français, hors contrat) est donc un devoir pour tout chrétien.


Can. 802 – § 1. S’il n’y a pas d’école où est donnée une éducation imprégnée d’esprit chrétien, il appartient à l’Évêque diocésain de veiller à ce qu’il en soit fondé.


Commentaire:
Quoi de plus clair ! Cet article nous oblige à fonder et donne obligation aux évêques à aller de l'avant: développer le réseau d'écoles catholiques et non pas s'en tenir à défendre les seules écoles existantes (en perdant année après année toujours plus de postes comme c'est le cas aujourd'hui alors qu'ils ont toujours plus d'élèves et toujours plus de dépenses induites).

"Allez enseigner toutes les Nations" nous dit le Christ. Tous les enfants ont droit à être scolarisés dans des écoles catholiques et non pas seulement les 20% que l'Etat français autorise à bénéficier de cet enseignement. Au nom de quoi instaurer une politique de quota en la matière? Pourquoi ne pas respecter le choix des parents?


§ 2. Là où cela est opportun, l’Évêque diocésain veillera à ce que soient fondées aussi des écoles professionnelles et techniques, et d’autres qui seraient requises par des besoins particuliers.

Commentaire: les besoins particuliers sont nombreux aujourd'hui. Ecoles professionnelles, écoles pour enfants handicapés ou surdoués, internats pour enfants de familles en difficulté, écoles pour enfants de banlieue ou cités défavorisés qui n'ont de choix bien souvent qu'un public on ne peut plus dégradé... Il faut fonder des écoles en banlieue. La charité l'exige.


Can. 803 – § 1. On entend par école catholique celle que dirige l’autorité ecclésiastique compétente ou une personne juridique ecclésiastique publique, <u>ou que l’autorité ecclésiastique reconnaît comme telle par un document écrit.

Commentaire: cf. en début de message.
De plus en plus d'écoles hors contrat prennent l'initiative de demander à leur évêque une visite de tutelle afin de bénéficier d'une telle reconnaissance.

§ 2. L’enseignement et l’éducation dans une école catholique doivent être fondés sur les principes de la doctrine catholique ; les maîtres se distingueront par la rectitude de la doctrine et la probité de leur vie.
Commentaire:
Les enfants imitant le modèle que constitue le professeur, il importe qu'il témoigne le plus fortement possible de sa fidélité au Christ : foi vécue, charité et sens de la justice, respect des commandements...

§ 3. Aucune école, même si elle est réellement catholique, ne portera le nom d’école catholique si ce n’est du consentement de l’autorité ecclésiastique compétente.

Commentaire:Aucune école ne peut se déclarer elle-même catholique. C'est à nos évêques et aux supérieurs majeurs de congrégation de le faire, si l'école le mérite effectivement.


Can. 806 – § 1. À l’Évêque diocésain revient le droit de veiller sur les écoles catholiques situées sur son territoire et de les visiter, même celles qui ont été fondées ou qui sont dirigées par des membres d’instituts religieux ; il lui revient aussi d’édicter des dispositions concernant l’organisation générale des écoles catholiques : ces dispositions valent même pour les écoles qui sont dirigées par les membres de ces instituts, en sauvegardant pourtant leur autonomie quant à la direction interne de ces écoles.

§ 2. Les Modérateurs d’écoles catholiques veilleront, sous la vigilance de l’Ordinaire du lieu, à ce que l’enseignement qui y est donné, du moins au même niveau que dans les autres écoles de la région, se distingue du point de vue scientifique.

Commentaire: ce point est important. L'Eglise ne peut se désintéresser du contenu des enseignements profanes et de la pédagogie. Les savoirs enseignés dans les écoles catholiques doivent être conformes à la vérité, "scientifiques", c'est-à-dire ni approximatifs ni idéologiquement orientés. Aujourd'hui, l'Eglise, en raison du contrat, n'effectue pas systématiquement ce contrôle. Il est clair que susciter le développement de manuels chrétiens et améliorer la qualité de la formation des professeurs (réforme des CFP) serait cohérent par rapport à ce but de qualité scientifique de l'enseignement des écoles catholiques.


J'aimerais aussi ajouter un extrait de VATICAN II- GRAVISSIMUM EDUCATIONIS – 1965 au sujet du monopole d'Etat en matière scolaire (Il y a bien un monopole éducatif en France puisque l'Etat impose aux écoles privées ses programmes et sa philosophie éducative par le biais des inspections pédagogiques)

6. Devoirs et droits des parents
« Le devoir et le droit premiers et inaliénables des parents est celui d'éduquer leurs enfants; ils doivent donc jouir d'une liberté véritable dans le choix de l'école. Le pouvoir public, dont le rôle est de protéger et de défendre les libertés des citoyens, doit respecter la justice distributive en répartissant les subsides publics de telle sorte que les parents puissent jouir d'une vraie liberté dans le choix de l'école de leurs enfants, conformément à leur conscience. ""C'est encore le rôle de l’État de veiller à (...)développer l'ensemble du système scolaire, en gardant devant les yeux le principe de subsidiarité, et donc en excluant tout monopole scolaire, lequel est opposé aux droits innés de la personne humaine, au progrès et à la diffusion de la culture elle-même, à la concorde entre les citoyens, enfin au pluralisme aujourd'hui en vigueur dans une multitude de sociétés. "


Les textes du magistère sont nombreux. Nous vous invitons à prendre le temps de lire les textes de la congrégation pour l'éducation catholique qui sont:
- Eduquer ensemble dans l’école catholique (22/11/2007)
- Les personnes consacrées et leur mission dans l’école (28/10/2002)
- L’école catholique au seuil du troisième millénaire (28 décembre 1997)
- Dimension religieuse de l’éducation dans l’école catholique (7 avril 1988)
- Orientations éducatives sur l’amour humain. Traits d’éducation sexuelles (1/11/1983)
- Le laïc catholique témoin de la foi dans l’école (15 octobre 1982)
- L’école catholique (19 mars 1977)


Enfin, il importe de dire quelques mots du statut de l'enseignement catholique, document français promulgué par les évêques de France
le 14 mai 1992, puis complété en 1996 et en 1999. Ce texte ne concerne que « l’Enseignement catholique », compris ici comme l’ensemble organisé d’écoles catholiques liées contractuellement à l’Etat. Toutefois, dans son article 1, ce texte rappelle quels sont les différents types d'établissement et il est intéressant de voir qu'il reconnaît clairement la catholicité des établissements fondés par des laïcs (nos établissements hors contrat en pratique).

Titre 1 l’établissement catholique d’enseignement
Article 1
« L’établissement catholique d’enseignement (…) est érigé :
- soit par l’autorité ecclésiastique d’un diocèse,
- soit avec l’accord préalable de l’Evêque diocésain, par une congrégation religieuse, ou par une autre personne juridique publique, au sens du Code de Droit canonique (C. 312)
- soit par d’autres personnes ou groupes
En ce dernier cas, il est considéré comme établissement catholique lorsqu’il a reçu l’accord de l’autorité ecclésiastique compétente (c. 803)."


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