Bonsoir Personne !
Sur votre 1ère question, j’ai tenté de répondre à Catheter.
La 2ème question rejoint la première : ce n’est pas le rôle de l’avocat de chercher à connaître la vérité. Il n’est chargé que de la défense de son client. C’est le juge qui doit chercher la vérité, en précisant que l’avocat participe à l’œuvre de justice : la justice est traditionnellement représentée par une balance. Si une seule partie, l’accusation ou le demandeur, met ses arguments dans une balance, le juge sera démuni. C’est en posant sur la 2ème balance ses arguments que la défense va donner au juge des éléments différents, un éclairage autre, qui lui permettra de juger équitablement et de manière éclairée : soit il s’agira de preuves qui contredisent une affirmation adverse, soit ce sera un éclairage différent de faits qui sont en eux-mêmes établis. C’est pour cela que les avocats sont appelés des auxiliaires de justice : ils permettent que la justice soit rendue. Sans avocat pour défendre, ce serait impossible.
La 3ème question est beaucoup plus pratique : « De manière concrète, si un de vos client vous avoue les crimes pour lesquels il est poursuivi mais qu'il y a moyen de faire acquitter votre client (pour diverses raisons : absence d'aveu, pas assez de preuves...), quelle attitude serait à adopter selon vous ? ».
En pratique, un client qui avoue à son avocat son crime ou son forfait, c’est extrêmement rare et cela n’existe pour ainsi dire pas.
Les avocats sont en effet souvent perçus par certains clients (notamment en cas de commission d'office) comme faisant partie de la machine judiciaire qui est en train de les broyer. Nous sommes souvent obligés de leur rappeler que nous sommes là pour les défendre, et leur exposer les exigences du secret professionnel qui doit leur permettre de pouvoir se confier en toute confiance.
Au-delà, un client peut également mentir, même à son avocat et s’accuser d’une infraction qu’il n’a pas commise ou contester l’infraction qu’il a réellement commise (plus courant). Des personnes s’accusant d’une infraction qu’ils n’ont pas commise, c’est malheureusement extrêmement courant. C’est même la raison d’être de la réforme de la garde à vue dont nous allons parler plus bas.
C’est cette religion de l’aveu, érigé en reine des preuves et en véritable dogme, qui est à la base de centaines d’erreurs judiciaires et pas que les médiatiques (encore un exemple récent : Marc Machin qui, elle, est médiatique).
La seule chose qui compte finalement pour un avocat pour défendre son client, c’est le dossier, tout le dossier et rien que le dossier : est-ce qu’il y a des éléments suffisants pour établir avec certitude la culpabilité ou non ? Les déclarations du client car elles seront vraies ou fausses ne pourront en aucun cas suffire à établir cette culpabilité.
Même en présence d’une personne qui a volé et qui l'avouerait à son avocat, ce dont l’avocat n’a jamais aucune certitude, si les éléments de preuve ne sont pas présents, il doit soutenir la relaxe. Non pas en disant qu'il n'a pas volé, mais en disant que rien ne permet de l'en accuser. Car ce qui bénéficie peut-être à un coupable bénéficiera demain à l’innocent. C’est la raison d’être de la règle.
A l’inverse, si on se met à prendre des libertés avec la règle de preuve, les injustices se multiplieront d’autant.
Je connais l’argument qui consiste à dire qu’il vaut mieux une injustice (un innocent en prison) qu’un désordre (un coupable en liberté). Mais au-delà du fait que ceux qui tiennent cette maxime ne souhaiteraient pas qu'on la leur appliquât, il ne s'agit pas d'un argument mais d'un slogan.
Car le désordre nait de l’injustice. Et les règles de procédure et notamment de preuve sont justement là pour faire respecter la justice et donc l’ordre. Je crois que c’est Jean-Marc Varaut qui a dit : « le Code pénal est fait pour punir les coupables, et le code de procédure pénale pour protéger les innocents ».
Reste le cas de conscience. Il est évident qu’un avocat ne peut plaider contre sa conscience car il trahirait la morale, son serment, et ne défendrait pas correctement son client. Si en conscience il pense qu’il faut plaider « coupable » pour reprendre une expression de procédure anglo-saxonne, il ne peut pas plaider l’innocence.
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