Le Forum Catholique

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images/icones/neutre.gif  ( 8742 )Le Progrès par Lux (2010-03-22 20:56:05) 

Monsieur,

Merci pour vos précédentes réponses, toujours aussi passionnantes.

L'idée (ou, souvent, l'idéologie) de Progrès est largement responsable, à mon avis, de la ruine du catholicisme dans l'Europe occidentale - la religion étant placée, bien souvent, du côté de l'obscurantisme (état théologique, chez Comte, par exemple).
Certes, la mode est aujourd'hui passée, horreurs du vingtième siècle aidant. Pourtant, beaucoup de professeurs de philosophie laissent entendre qu'ils croient en un progrès dans la pensée, certes moins radical que chez Condorcet, mais bien réel. Cela les conduit à privilégier les auteurs les plus contemporains dans leurs études, et à malmener les Anciens parce que leur cosmologie s'est avérée fausse, les philosophes du Moyen-Age parce qu'ils étaient chrétiens, jusqu'à Bergson parce que le vitalisme ne tient pas scientifiquement. Ainsi, tout ce qui est actuel - démocratie, droits de l'homme en politique par exemple - est idéalisé. Est-ce vraiment légitime ? Plus largement, que vaut l'idée de progrès historique de la pensée, selon vous ? Y a-t-il un progrès de l'esprit humain ? Comment restreindre cette notion à sa juste valeur ? J'avoue que cette idée me pose de nombreux problèmes, et que mon esprit reste très flou (les questions sont dont peut-être un peu maladroites ; veuillez m'en excuser).

Lux
images/icones/neutre.gif  ( 8745 )à Lux par Maxence Caron (2010-03-22 21:13:42) 
[en réponse à 8742]

La notion de progrès m'est une aberration. Et si l'on applique cette notion à l'art ou à la pensée, on dépasse tout ce que l'imagination peut produire de plus baroque en matière de bêtise. Certaines choses dans l'ordre matériel peuvent bien avoir progressé, rien, et même au contraire, n'a pu progresser dans le domaine de l'esprit. J'aime, d'un plaisir cynique, voir ces chercheurs qui pensent sincèrement avoir fait progresser la pensée de Platon, par exemple, sous prétexte qu'ils ont multiplié les inutiles publications et produit un inédit champ de confusion...
Il n'y a pas de progrès en général, il n'y a que des génies, en particulier, qui de temps à autres et de moins en moins, percent le voile de la médiocrité.
L'humanité se trouve en une phase particulière de son histoire puisque, ne se contentant plus d'annuler dans le relativisme la distinction entre les valeurs, elle adule la laideur et porte le crime au pinacle. Ce n'est plus la post-modernité mais c'est l'outre-modernité. Depuis Adam l'humanité régresse, et depuis le Christ il lui est possible de faire de sa constituante faiblesse un lieu d'accueil pour la grâce. Du cataclysme de l'outre-modernité naît donc, paradoxalement, de profundis, un domaine d'intense appel envers l'initiative du Principe, afin qu'Il intervienne dans notre existence ; et la catastrophe de l'outre-modernité, qui cristallise et se scelle, annonce l'initiative terminale de la Sagesse qui vient.
images/icones/neutre.gif  ( 8748 )[réponse] par Lux (2010-03-22 21:26:28) 
[en réponse à 8745]

Merci infiniment.

Et, plus précisément, que répondriez-vous à ceux qui diraient que l'éthique d'Aristote est désuète, ou à nuancer très fortement, car elle correspond à une cosmologie réfutée (par exemple) ?
images/icones/neutre.gif  ( 8751 )à Lux par Maxence Caron (2010-03-22 21:43:45) 
[en réponse à 8748]

Je ne répondrais rien. Il est des moments où il vaut mieux se taire quand déferle une nullité photophobe et convaincue.
images/icones/neutre.gif  ( 8759 )[réponse] par Lux (2010-03-22 22:00:06) 
[en réponse à 8751]

Je me permets d'insister.

D'abord, parce que moi-même, encore étudiant, ne pourrais répondre convenablement, et ne rien dire est en quelque sorte battre en retraite. Je demande la réponse de ceux qui savent !

Ensuite, parce la question a une certaine légitimité, me semble-t-il. Le cosmos aristotélicien justifie son idée du bien et de l'harmonie qui en résulte. Les étoiles (le monde suprasensible) avaient un rapport direct, pour lui, avec la conduite de notre vie. Comment, donc, répondre avec rigueur à de tels contradicteurs ?
images/icones/hein.gif  ( 8760 )ne faut-il pas nuancer par Philippilus (2010-03-22 22:03:16) 
[en réponse à 8751]

selon les degrés d'abstraction considérés ?

Pour ce qui est du vôtre, le plus haut, le troisième: il est clair que la notion de progrès est difficile à envisager.

En revanche, pour les deux premiers degrés, le progrès me parait inhérent à la structure même de la pensée scientifique. En ce sens, le physicien Aristote est complètement dépassé.
Ce qui est intéressant, c'est de chercher de quelle manière le progrès physique ou mathématique peut entraîner de nouveaux éclairages en métaphysique. Et s'il n'y en avait simplement pas ?

Philippilus