Le Forum Catholique

http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=6224
images/icones/2e.gif  ( 6224 )Un liseur effrayé par le mélange des genres par baudelairec2000 (2008-11-21 21:37:26) 

bonsoir, je tiens à vous féliciter pour la qualité de votre ouvrage La Petite somme politique sur saint Thomas.

Permettez-moi de vous posez une question très simple:

qu'entendez-vous par théologie politique?

je compte sur vous pour préciser le domaine de définition de la "chose", son objet, ses limites...
images/icones/livre.gif  ( 6239 )Théologie de la politique ? par Denis SUREAU (2008-11-24 18:33:36) 
[en réponse à 6224]

Bonne question car le terme de « théologie politique » est équivoque, comme je l'explique au début de mon livre, mais je n'en connais pas de meilleure. La définition que je retiens est la plus académique : elle désigne simplement une réflexion proprement théologique sur les réalités politiques, une « théologie de la politique » ou une « théologie du politique ». Dans un monde anglo-saxon, elle est une discipline comme une autre, avec sa revue scientifique (Political Theology), ses manuels d'initiation pour étudiants (The Blackwell Companion to Political Theology) etc. Rien de farfelu. Elle est l’analyse et la critique des phénomènes politiques (incluant leurs aspects culturels-psychologiques, sociaux et économiques) à partir du point de vue des différentes interprétations des rapports de Dieu avec le monde. Toute théologie est politique. En effet le christianisme n'est pas un corps de croyances seulement destiné à la discussion intellectuelle abstraite, mais un mode de vie qui incarne ces croyances, et les relations sociales en sont une composante importante. Toute théologie implique donc une vision implicite ou explicite de l'organisation des communautés humaines (théologie chrétienne, je précise, bien que je ne suis pas sûr qu'il existe une théologie en dehors du christianisme).
Cependant, affirmer que toute théologie est politique ne revient pas à réduire la foi aux questions politiques ni à nier la dimension transcendante et spirituelle du christianisme. Il s'agit d'aborder les questions politiques non en acceptant d'emblée, comme un donné, les présupposés, le langage et la grammaire de l'idéologie dominante (quitte à procéder à des rectifications et compléments dans un second temps) mais en se fondant sur ses ressources spécifiques. C’est à partir de « lieux » proprement théologiques que la théologie politique peut analyser voire « déconstruire » le libéralisme avec ses concepts piégés (État, droits de l’homme, égalité, ordre constitutionnel, souveraineté etc.)

images/icones/hum2.gif  ( 6302 )perplexe, pas du tout convaincu... par baudelairec2000 (2008-11-24 21:11:06) 
[en réponse à 6239]

j'avoue, monsieur Sureau, ne pas comprendre grand chose à ce discours. Il me semble que vous n'expliquez rien. Pour un thomiste attardé comme moi, rien d'étonnant; d'ailleurs, l'histoire médiévale qui a vu durant des siècles s'incarner une politique chrétienne aurait du mal à s'y retrouver. La cité chrétienne a existé, il s'agit de la retrouver; et je connais de nombreux historiens de la période dite médiévale (M. Rouche, Y. Sassier, P. Depreux, O. Guillot, D. Alibert, B. Dumézil, la liste est loin d'être close)qui écrivent sur les rapports politique et religion des textes non équivoques. Je sais, la Révolution est passé par là, la modernité a tout emporté, la nature humaine a-t-elle pour autant changé? Que devient dans ce contexte de "théologie politique" la distinction gélasienne des deux spères (nous sommes juste avant l'an 500 de notre ère), la subordination du temporel au spirituel chère au Docteur Angélique? Le politique dispose à l'extérieur les individus alors que l'Eglise les transforme de l'intérieur. Je ne peux que vous renvoyer aux textes fondamentaux de saint Thomas que vous avez eu la riche idée de mette à la portée de tous. Je crains fort que tout cela ne soit jeté par dessus bord avec la modernité ou la tentative de vouloir concilier les inconciliables.
images/icones/neutre.gif  ( 6306 )Je suis thomiste par Denis SUREAU (2008-11-24 21:25:33) 
[en réponse à 6302]

J'ai du mal à comprendre votre perplexité. Gélase et saint Thomas sont des éléments essentiels pour les penseurs de la théologie politique que je présente. D'une certaine façon il s'agit d'un débat interne au thomisme. Pour saint Thomas, la cité doit être ordonnée comme chacun de ses membres au bien commun ultime, qui n'est autre que Dieu.
images/icones/1a.gif  ( 6313 )ouf ! par baudelairec2000 (2008-11-24 21:42:36) 
[en réponse à 6306]

à présent je vous comprends beaucoup mieux que précédemment. N'y aurait-il pas en fait deux Denis Sureau, celui qui vient de me répondre à l'instant, et un autre qui utilise un jargon, s'aventure dans le domaine de la théologie politique qui présente, pour moi, l'inconvénient de confondre les deux sphères? Car il me semble difficile, pour le politique, de puiser ses principes dans le spirituel. Rien n'empêche d'ailleurs que les dirigeants soient chrétiens et veuillent pour leurs "administrés" ce qu'ils désirent pour eux-mêmes.

images/icones/neutre.gif  ( 6317 )Attention aux deux sphères par Denis SUREAU (2008-11-24 21:52:45) 
[en réponse à 6313]

Alors là je ne vous suis plus. Derrière vos deux sphères je vois clairement se cacher le sécularisme moderne : une sphère politique, une sphère spirituellle. Mais cela ne tient pas car l'unique sphère spirituelle englobe la sphère morale/politique. L'homme n'a qu'une seule fin, qui est surnaturelle, et toutes les autres fins intermédiaires sont subordonnées.
images/icones/hum2.gif  ( 6334 )Adieu, Gélase ! par baudelairec2000 (2008-11-24 22:20:55) 
[en réponse à 6317]

"l'unique sphère spirituelle englobe la sphère morale/politique". Ca se corse... Si ce n'est pas une confusion du spirituel et du temporel, c'est à n'y plus rien comprendre. Autre chose est d'affirmer que le politique est subordonné au religieux, en vertu de la subordination des fins. La subordination des fins n'empêche pas la distinction des deux sphères; il faudrait que vous m'expliquiez comment vous arrivez à maintenir la distinction et la subordination des deux sphères.

baudelairec2000 qui part se réfugier dans quelques bons ouvrages sur le Haut Moyen Age dont l'excellent Royauté et Idéologie au Moyen Age d'Yves Sassier (Armand Colin) ou bien encore Arcana imperii (IVe-XIe siècle) d'Olivier Guillot (Presses Universitaires de Limoges), sans oublier les belles pages de Karl Ferdinand Werner dans son Histoire de France des origines (Fayard) quand le droit vient au secours de l'histoire, quand l'histoire déroule le tapis sous les pieds de l'Eglise...

à bientôt, monsieur Sureau.
images/icones/hein.gif  ( 6307 )Maurras par Toussaint (2008-11-24 21:28:28) 
[en réponse à 6239]

Votre "Toute théologie est politique" rejoindrait-il le "politique d'abord" de Maurras ?
Qu'en pensez-vous ?
images/icones/neutre.gif  ( 6318 )Théologique d'abord par Denis SUREAU (2008-11-24 21:55:08) 
[en réponse à 6307]

Euh non c'est plutôt le contraire : théologique d'abord; sans oublier le politique. Il s'agit moins de politiser la théologie que de théologiser le politique.
images/icones/hum2.gif  ( 6321 )Excusez-moi par Paxi (2008-11-24 22:00:03) 
[en réponse à 6318]

mais je ne comprends pas vos références à Emile Poulat (vu sa biographie).
images/icones/1b.gif  ( 6325 )Distinguer par Jean-Paul PARFU (2008-11-24 22:01:16) 
[en réponse à 6318]

et non séparer !