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[réponse] par Gabriel Dubois (2009-01-20 18:33:23) Imprimer

La Restauration, mais également la monarchie de juillet, et l’œuvre d’Henri V ont apporté leur pierre dans l’histoire de France, c’est indéniable. Sans l’œuvre des ministres de Louis XVIII pour rétablir les finances, libérer le territoire de l’occupation alliée après 1815, rendre son honneur à la France sur le plan international, l’histoire du XIXe siècle français aurait été moins brillante. Le dire est presque une banalité tant c’est évident.

On peut placer un homme comme Louis XVIII au rang des grands chefs d’Etats de la France contemporaine, largement à égalité avec Napoléon III ou Charles De Gaulle. Il fait partie de la poignée d’hommes qui, après la Révolution, ont le plus contribués à faire la France.

De ce fait, l’œuvre de la Restauration a bien une incidence concrète sur la France d’aujourd’hui.

Concernant l’engagement catholique social du comte de Chambord, il serait intéressant d’étudier de plus prêt l’excellente thèse d’Etat de Jean Baptise Duroselle sur les Origines du Catholicisme Social, de 1821 à 1871. Œuvre monumentale, incroyablement documentée, elle permet de mieux voir les sources du catholicisme social, et par là, les premières œuvres en faveur d’une doctrine sociale de l’Eglise.

On aime bien dire, dans certains milieux royalistes, que les premiers catholiques sociaux furent royalistes, légitimistes, influencés par l’œuvre du comte de Chambord, etc. Autrement dit, les royalistes, parfois, aimeraient bien s’approprier la paternité du catholicisme social. La réalité doit être plus nuancée.
Le premier homme à s’être exprimé sur la question sociale en la comprenant en tant que telle, fut, selon toute vraisemblance, le Père Félicité de Lammenais, Dans les colonnes du journal légitimiste Le Drapeau Blanc, en 1821. Mais son évolution progressive vers le libéralisme ne peut permettre de le ranger dans un camp royaliste, encore aujourd’hui. Après cela, s’il faut bien admettre que nombre de catholiques sociaux sont royalistes, comme le préfet Villeneuve Bargemont, d’autres, d’un catholicisme pourtant irréprochable, sont des «socialistes-chrétiens » assez proches des socialistes utopiques de la même période. Ceux qui rêveront des mondes parfait taillés au centimètre. A tout seigneur tout honneur, ces premier catholiques sociaux, qu’ils soient légitimistes ou socialistes chrétiens, furent les premiers à théoriser le revenu minimum, l’assurance chômage, l’assurance maladie, l’optimisation des jachères, etc. De petites révolutions, en somme, à l’époque où des enfants de 6 ans poussaient des wagonnets dans les mines. Le mouvement socialiste chrétien va quasiment disparaître en 1848. Proche des milieux démocrates ou révolutionnaires, le pouvoir les jugera suspect et obtiendra leur dispersion progressive. Resteront alors les légitimistes, quelques catholiques libéraux et les prêtres à l’origine des conférences St Vincent de Paul. C’est sur cette nouvelle base que se reconstruira le catholicisme social.

L’hégémonie des royalistes légitimistes dans la pensée catholique sociale après 1870 ne peut pas non plus être niée, mais elle s’explique en partie par les événements précédents. Quoi qu’il en soit, Albert de Mun et René de la Tour du Pin, pères du catholicisme social de l’après 1870, avec Frédéric Le Play, ne doivent pas leur action au comte de Chambord, semble-t-il. Les deux premiers se sont « convertis » au catholicisme social durant leur captivité en Allemagne, en lisant les ouvrages du père du catholicisme social allemand, Mgr Ketteler. Le troisième, polytechnicien, se situe plutôt dans la ligne d’un Villeneuve Bargemont et des catholiques sociaux légitimistes de l’avant 1848, dont certains pourraient être vus comme les lointains ancêtres des mouvements « planistes » de l’entre deux guerre, tant leur volonté organisatrice et planificatrice était forte.
Dans tout cela, on doit, bien sûr, parler de la pensée sociale du comte de Chambord, qui est réelle. Le comte de Chambord est peut-être l’un des premiers, si ce n’est le premier prince d’Europe à s’être prononcé avec intérêt sur la question sociale. De même, il est, avec Napoléon III, l’un des premiers français authentiquement influents à s’être penché sur cette question et à avoir voulu y apporter une solution constructive. Enfin, il est vrai que les lettres du comte de Chambord, sur le sujet, correspondent, avant la lettre, à des fondamentaux de la Doctrine Sociale de l’Eglise. En somme, le comte de Chambord est un précurseur de Rerum Novarum. Mais ce serait pécher par omission que d’en faire le seul inspirateur. Si les catholiques sociaux légitimistes de l’après 1870 furent très heureux de trouver une oreille ouverte chez leur prince, ils ont médité leurs systèmes indépendamment de ses manifestes. Et leur influence sur la gestation de la DSE est autrement plus forte.

Donc, oui, rendons au comte de Chambord son engagement social, souvent ignoré, rendons lui également son influence, car le soutien d’un prince n’a pu qu’être utile aux catholiques sociaux, mais n’en faisons pas non plus, comme le font certains royalistes, le quasi père du catholicisme social moderne, ce serait un mensonge historique.

Pour répondre, maintenant, le plus concrètement possible à votre dernière question, oui, je pense bien un jour traiter du XIXe siècle et aborder la Restauration, le comte de Chambord, les catholiques sociaux. Mais, je crains qu’il ne vous faille attendre quelques années avant que je sois en mesure de publier un tel ouvrage.
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images/icones/bravo.gif Et le Comte de Chambord ? par Lamy (2009-01-19 13:34:56)
     images/icones/fleur.gif Bravo pour votre site ! par Ennemond (2009-01-19 13:49:20)
     images/icones/neutre.gif [réponse] par Gabriel Dubois (2009-01-20 18:33:23)



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