Vous ne vous étonnerez pas que je ne puisse régler en quelques de Forum un sujet qui a rempli des dizaines de milliers de pages depuis plus de 50 ans (il n'y a pas que Garrigou-Lagrange dans les innombrables opposants aux thèses de Lubac!).
Le petit consensus auquel vous faites allusion est bien limité dans le temps et dans l'espace que le vaste consensus auquel il s'oppose.
Je ne crois donc pas qu'il y ait à argumenter sur ce mode.
Puisque vous faites référence à Gilson, je me permets de vous rappeler que, sur des points de plus en plus nombreux, divers auteurs contemporains, reconnaissent et démontrent que sa doctrine n'est pas celle de Saint Thomas.
Deux exemples: - le P. Humbrecht (qu'on accusera certes pas de manque d'amour Gilsonien) affirme expréssement dans sa récente thèse, que Gilson se sépare de saint Thomas en affirmant en plusieurs liex que Dieu n'a pas d'Essence.
- McInerny, dans son récent ouvrage "preambula fidei", montre comme il l'avait déjà fait il y une trentaine d'années que Gilson contredit saint Thomas sur la question du jugement d'existence. Ce même auteur expose en outre, de façon détaillée, comment de Lubac et Gilson ont carricaturé sur plusieurs points la pensée de Cajetan.
En ce qui concerne "radical orthodoxy", je vous ferais remarquer que l'un des principaux auteurs de ce mouvement (Milbank), dans son ouvrage "le milieu suspendu" met bien en lumière l'opposition réelle entre la pensée de fond de Lubac concernant le surnaturel et l'enseignement de Pie XII, dans "Humani Generis". Bien plus, Milbank montre que le système de pensée de Lubac rend impossible une synthèse catholique "philosophico-théologique" cohérente. Milbank, qui admire Lubac, s'en réjouit. Mais Milbank est anglican...
D'ailleurs, les récents débats que vous avez eus ces derniers temps avec divers auteurs sur les rapports entre l'Eglise et l'Etat montrent assez bien, du moins à mon jugement, que vous-même n'arrivez pas à une synthèse cohérente dans cette ligne lubacienne.
Bien entendu, je ne pense pas avoir clos le débat par ces quelques considérations. Il y aurait certainement matière à le prolonger en d'autre lieux.
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